Non au mépris pour les gens qui se lèvent tôt
- Salaires et CCT

© Photo: Y. Kusano pour l'USS
Il paraît que le président du PLR veut se battre pour ceux et celles qui se lèvent tôt le matin pour aller travailler.
Ce serait fantastique si c’était vrai.
Mais, selon ce président de parti, toutes celles et ceux qui se lèvent tôt pour aller travailler à plein temps ne méritent même pas un salaire conforme aux normes minimales de l’assistance publique. Travailler 42 heures par semaine, 180 heures par mois ne doit même pas assurer d’avoir plus à la fin du mois que ce qui est donné à celles et ceux qui n’ont aucun travail.
Se battre pour ceux qui se lèvent tôt pour aller travailler, quel bel engagement ! Mais que vaut-il, que vaut la parole de ce parti s’il vote une loi qui conteste ce principe simple : travailler à plein temps doit permettre de vivre un peu mieux que de ne pas travailler du tout. Le travail doit payer au moins autant que l’assistance publique : quand on ne respecte pas ce principe, quand, dans les faits, on combat ce principe, on ne devrait pas oser dire qu’on se bat pour ceux qui se lèvent tôt pour aller travailler. Une telle hypocrisie devrait faire honte.
Nous, syndicats, nous voulons que celles et ceux qui ne peuvent pas travailler aient le droit à un revenu qui permet de vivre, conformément aux principes de notre Constitution. Nous signons parfois des conventions collectives avec des salaires de départ inférieurs aux normes sociales, parce que sans ces normes conventionnelles les salaires seraient encore plus bas. Mais quand le législateur fixe à la fois les normes de l’aide sociale et le salaire minimum, il ne doit pas être possible que le second soit inférieur aux premières. Nous voulons que le travail paie.
Le Tribunal fédéral a autorisé les cantons à fixer un salaire minimum si celui-ci est équivalent aux normes sociales qui garantissent le minimum vital. Il a estimé que c’est une façon économique et libérale de protéger les finances publiques et d’atteindre l’objectif de protection d’une vie digne pour toutes et tous garantie par la Constitution.
Ce droit a été donné aux cantons et certains en ont fait usage. Ils ont légiféré, le peuple s’est même parfois prononcé et dans certains cantons, peut-être bientôt dans certaines villes, ce droit est en vigueur.
L’UDC fait campagne en ce moment en prétendant vouloir sauver notre démocratie directe qui serait menacée par les nouveaux accords avec l’Union européenne. Ce sera un débat passionnant. Mais que vaut la parole de ce parti quand demain il s’apprête à annuler la volonté populaire clairement exprimée en faveur d’un salaire minimum à Genève par exemple. Quelle justification y a-t-il à annuler par une loi fédérale le vote du peuple de ce canton ? Qui est gêné à Obwald, à Zug ou à Zürich par le salaire minimum voté par le peuple à Genève ?
La réponse est : personne, absolument personne. Un principe fondamental de notre démocratie suisse, c’est le fédéralisme. C’est de laisser au niveau le plus proche du citoyen les décisions qui ne portent aucun préjudice aux autres Confédérés. Quelle est la valeur du combat pour la démocratie directe de l’UDC quand on commet une telle agression contre la décision souveraine et démocratique du peuple d’un canton de notre pays ? Ici aussi une telle hypocrisie devrait faire honte.
Le Centre n’est pas en reste, puisque cette loi vient de la motion de l’un de ses membres. Que n’entend-on pas des élus de ce parti comme mises en garde ou protestations quand un projet pourrait manquer de base constitutionnelle ? Mais au sujet de cette loi qui permettrait de déroger aux salaires minimaux cantonaux, aucun scrupule n’apparaît pour fouler aux pieds notre Constitution et ses principes.
Une telle hypocrisie collective, un tel reniement de ses propres principes affichés n’ont pas lieu sur n’importe quel sujet. Il ne s’agit pas du subventionner la garde des bêtes à cornes ou d’interdire les minarets. Il s’agit de la valeur du travail, de salaire et de minimum vital. Il s’agit d’une coiffeuse, d’un serveur dans un restaurant, d’une vendeuse dans une boutique ou d’une aide-soignante à domicile, qui travaillent à plein temps et qui se demandent au supermarché s’il est possible d’acheter ces deux barquettes de fraises et cette tranche de bœuf pour le repas en famille de dimanche.
Nous invitons ces partis politiques gouvernementaux à se reprendre et à ne pas commettre ce vote de mépris pour celles et ceux qui se lèvent tôt pour travailler dur.
Responsable à l'USS
Daniel Lampart
Co-direction du secrétariat et économiste en chef031 377 01 16
daniel.lampart(at)sgb.ch
