Session parlementaire d'été

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Bref aperçu des principaux thèmes d'un point de vue syndical

N'instaurons pas des heures d'ouverture des magasins minimales dans tout le pays !

La majorité de droite du Parlement veut obtenir par la force une loi sur les heures d'ouverture des magasins (LOMag) qui détériorerait drastiquement les conditions de travail du personnel de vente. Si le Conseil des États devait céder, les syndicats saisiraient alors le référendum.

Luca Cirigliano, secrétaire central de l'USS

L'an dernier, le Conseil des États n'est pas entré en matière sur la loi, le Conseil national l'a par contre acceptée ce printemps. C'est donc à nouveau au tour de la Chambre basse de délibérer - et sa majorité veut se joindre à la décision du Conseil national.

La LOMag veut forcer tous les cantons à avoir les mêmes heures d'ouverture des magasins. Ce qui dérégulerait les horaires de travail, en particulier ceux du soir et du samedi. On édicterait ainsi aux cantons des heures d'ouverture des magasins minimales du lundi au vendredi de 6 à 20 heures et le samedi de 6 à 19 ou 18 heures.

Cette extension des heures d'ouverture se répercuterait négativement sur les travailleurs et travailleuses concernés. C'est particulièrement le cas pour les femmes travaillant à temps partiel qui doivent assumer des tâches éducatives ou de soins, et qui ont de surcroît des conditions de travail précaires. Les travailleurs et travailleuses concernés se sont aussi prononcés contre des heures d'ouverture plus longues dans plusieurs sondages. Il n'y a en outre toujours pas de convention collective de travail (CCT) nationale dans le commerce de détail. L'association patronale de la branche, Swiss Retail Federation, a jusqu'à maintenant obstinément refusé de négocier une CCT. C'est inacceptable.

Les syndicats s'opposent aussi pour une autre raison à cette loi. Elle est représentative de la tactique habituelle du salami destinée à complètement déréguler les horaires de travail. Le commerce de détail est d'abord visé, ce sera ensuite le tour de toutes les branches. Les syndicats doivent veiller à gripper cette machine bien huilée. Ces derniers défendent la santé ainsi que la préservation de la vie familiale et sociale des travailleurs et travailleuses. Raison pour laquelle, ils s'opposent à la dérégulation des horaires de travail. Et voilà pourquoi ils combattront la LOMag par référendum si celle-ci devait être acceptée telle quelle.

Réforme de l'imposition des entreprises III

Pendant cette session, le Parlement va achever ses délibérations sur la troisième réforme des entreprises (RIE III). On ne peut malheureusement pas escompter que la direction prise jusqu'à présent change en quoi que ce soit. L'USS va donc soutenir le référendum contre la RIE III.

Daniel Lampart, économiste en chef de l'USS

L'objectif de RIE III était initialement que la Suisse supprime les privilèges fiscaux injustes dont bénéficient les entreprises et les sociétés financières internationales. L'USS l'avait soutenue. Toutefois, les tenants de la droite bourgeoise ont abusé de cette réforme d'une manière crasse afin de continuer à garantir à leurs entreprises et à leurs actionnaires des privilèges fiscaux.

L'USS estime que la RIE III provoque une nouvelle concurrence fiscale à la baisse étendue. C'est pour ainsi dire pervers que la Confédération attise cette concurrence fiscale en transférant plus d'un milliard de baisses d'impôts aux cantons.

Ce qu'on appelle l'" impôt sur les bénéfices avec déduction des intérêts " crée un trou noir dans la législation fiscale suisse. Il faut s'attendre à de grandes pertes fiscales que personne ne peut estimer pour l'instant, comme ce fut déjà le cas pour la deuxième réforme des entreprises. Cet impôt permet aussi aux riches particuliers de diminuer substantiellement leurs contributions fiscales, dans le sens où ils déplacent leur fortune dans une entreprise.

Le Conseil national et celui des États ont en outre créé toute une série de privilèges fiscaux (patent box ou boite à brevets, déductions R&D, entre autres). Ils prétendent qu'avec une limitation de la déduction fiscale maximale, ils évitent 80 % des pertes de recettes fiscales. Mais ce n'est que de la poudre aux yeux, car rien qu'avec cette règle, une charge fiscale d'un niveau extrêmement bas de 3 % est totalement légale.

En résumé : la RIE III provoquera d'énormes pertes de recettes fiscales pour la Confédération, les cantons et les communes. Certaines entreprises ne vont presque plus payer d'impôts. Et ce sont les personnes qui gagnent normalement leur vie qui vont devoir passer à la caisse. L'USS refuse de ce fait la RIE III et va soutenir le référendum.

Le programme de législature

Par 91 voix contre 89, le Conseil national a, sans avancer aucun argument valable, éjecté du Programme de législature du Conseil fédéral la révision de la loi sur l'égalité entre femmes et hommes. Le Conseil des États a maintenant la possibilité de corriger cette erreur grotesque.

Regula Bühlmann, secrétaire centrale de l'USS

Depuis que le Conseil fédéral a annoncé des mesures légales contre la discrimination salariale à l'encontre des femmes, la droite et les patrons sont vent debout contre ces mesures et, niant la réalité, contestent l'existence même de cette discrimination. Ne voulant pas que l'on mette le nez dans leurs affaires, ils placent la liberté entrepreneuriale au-dessus des droits fondamentaux et ont en horreur la transparence en matière de salaire.

Après les élections fédérales de l'an dernier, cette position est également plus que majoritaire au sein du Parlement. Après que le Conseil fédéral eut mis en consultation en novembre 2015 la révision on ne peut plus nécessaire de la loi sur l'égalité, le Conseil national a décidé, lors de la session spéciale d'avril 2016, de biffer cet objet du programme de législature du Conseil fédéral. Ce dernier n'aura de ce fait pas à soumettre de message à ce sujet aux Chambres fédérales.

Tout à fait indépendamment de l'appréciation politique que l'on peut faire de la révision en question, stopper net un débat déjà entamé témoigne d'une conception des plus douteuses de la démocratie. Nul besoin d'être de manière générale favorable à des contrôles des salaires pour en discuter. Mais qui prend au sérieux les vœux de la population, estime à leur juste valeur les efforts du Département fédéral de justice et police pour élaborer un projet apte à convaincre une majorité et ne veut pas passer sans autre outre aux réflexions de la majorité des organisations qui ont participé à la procédure de consultation, doit être prêt à mener à terme les délibérations. Telle est la conception du fonctionnement de l'État que nous attendons du Conseil des États. Sa commission a déjà préparé le terrain et recommande de maintenir la révision dans le programme de législature.

Mais au-delà, il n'en reste pas moins que les femmes continuent à ne pas toucher le même salaire que les hommes pour un travail de valeur égale. Sinon, pourquoi la moitié des entreprises qui ont procédé à une analyse de leur système salarial ont-elles adapté ce dernier ? Sans contrôle, elles n'auraient même pas vu qu'il y avait lieu d'agir à ce chapitre. C'est pour cela que l'Union syndicale suisse (USS) demande instamment des contrôles des salaires dans les entreprises de tout le pays ainsi qu'une autorité fédérale habililitée à prononcer des sanctions, des contrôles par sondage et la participation des syndicats aux niveaux national et des entreprises. S'il le veut, le Conseil fédéral peut soumettre au Parlement, même sans prescription figurant dans son programme de législature, un message à ce sujet. S'il le veut... Il est toutefois vrai qu'une prescription dans le programme de législature accentuerait la pression sur le gouvernement pour qu'il le veuille vraiment. Le Conseil des États doit corriger cette mauvaise décision du National et maintenir la pression sur le Conseil fédéral pour qu'il trouve une bonne solution en faveur de l'égalité des salaires.

Naturalisation... Cela pourrait enfin bouger dans le bon sens !

Après l'échec de l'initiative dite " de mise en œuvre ", les syndicats ont décidé de lancer une offensive de naturalisation pour les jeunes étrangers de la deuxième génération. Paul Rechsteiner, président de l'USS, interpellera le Conseil fédéral en ce sens.

José Corpataux, secrétaire central de l'USS

Au lendemain de la votation du 28 février 2016, l'USS, qui compte parmi ses membres un grand nombre de migrantes et de migrants, a invité tout particulièrement les jeunes étrangers de seconde génération à s'interroger sur une potentielle naturalisation.

Le résultat de cette votation marque, en effet, une véritable rupture. Une majorité des votants a considéré que les " secondas " et les " secondos " sont clairement partie prenante de la Suisse. Lors de la prochaine session, le président de l'USS et conseiller aux États Paul Rechsteiner interpellera dans ce sens le Conseil fédéral. Il demandera à ce dernier si celui-ci est prêt à s'engager afin que la naturalisation des personnes issues de la seconde génération - qui sont nées et ont grandi ici - soit activement encouragée et à mener en conséquence une campagne de sensibilisation qui s'adressera tant aux jeunes concernés qu'à leurs parents.

En 2008 déjà, la conseillère nationale Ada Marra déposait une initiative parlementaire intitulée " La Suisse doit reconnaître ses enfants ", qui demandait, quant à elle, que les migrantes et les migrants de la troisième génération qui sont nés et qui ont grandi en Suisse bénéficient d'une procédure facilitée de naturalisation. Après le feu vert du Conseil fédéral et du Conseil national, et maintes tergiversations du côté du Conseil des États et de sa Commission des institutions politiques, le projet semble enfin en bonne voie et sera également débattu lors de la session qui vient. La Commission des institutions politiques du Conseil des États a néanmoins quelque peu serré la vis par rapport à la version du Conseil national. Il faudra, par exemple, que les demandes de naturalisation facilitée soient déposées avant l'âge de 25 ans ou encore certifier que l'un des grands parents a été titulaire d'un permis de séjour alors qu'il suffisait de l'établir de manière crédible dans la version du Conseil national.

L'USS ne soutient pas ces durcissements... Elle aurait été favorable à une procédure de naturalisation tout simplement automatique pour les personnes de la troisième génération. Néanmoins, une procédure facilitée peut déjà être considérée comme un premier pas allant enfin dans la bonne direction.

Message FRI 2017-2020

Le Message Formation, Recherche et Innovation (FRI) 2017-2020 sera discuté par le Conseil national le 9 juin. 

Laura Perret, secrétaire centrale de l'USS

Ce message tire le bilan de la dernière période (2013-2016) et définit les objectifs et les moyens pour la prochaine période (2017-2020). Avec un budget de près de 26 milliards sur quatre ans, ce programme prévoit quatre priorités d'encouragement : le financement des cours préparatoires aux examens professionnels fédéraux, l'encouragement de la relève scientifique, l'augmentation du nombre de diplômes délivrés en médecine humaine, l'encouragement de l'innovation.

Le problème est que ce message FRI a été élaboré avec une croissance initiale annuelle de 3,2 %. Il a subi une cure d'amaigrissement de quelque 800 millions pour tomber à un taux de croissance de 2 %, sans que les objectifs et priorités ne soient adaptés en conséquence. Le domaine FRI fait aussi les frais du programme de stabilisation 2017-2019 de la Confédération avec une coupe de l'ordre de 555 millions. " Faites davantage avec moins de moyens ", en somme.

L'USS s'oppose clairement à ces mesures d'austérité. Elle a formulé 5 revendications :·

  • un taux de croissance annuelle de minimum 3.9% ;·
  • le renforcement de la formation professionnelle supérieure, mais pas au détriment de la formation professionnelle initiale ;·
  • l'augmentation du budget des bourses ;·
  • l'augmentation du budget de la formation continue ;·
  • des profils clairs pour la relève scientifique des Hautes écoles spécialisées, notamment des enseignant(e)s actifs dans la pratique.

En conclusion, l'USS s'engage pour un renforcement de l'ensemble du système FRI. Ce n'est que dans un esprit de collaboration et de partage que nous pourrons continuer à développer un système de formation excellent qui profite aux personnes en formation et à l'économie.

Intégration des réfugiés

L'arrivée des réfugiés présente de nombreux défis en matière d'intégration dans la société et sur le marché du travail. Afin de favoriser l'intégration professionnelle des réfugiés, le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) a lancé un projet-pilote d'apprentissage pour les réfugiés. Celui-ci sera effectif à partir de 2018 et s'adressera à quelque 800 à 1000 personnes par année et par mesure. Il contient un préapprentissage d'intégration et un programme d'acquisition précoce de compétences linguistiques (langue locale). Il démarrera en 2018 et concernera entre 800 et 1 000 personnes par année et mesure.

Laura Perret, secrétaire centrale de l'USS

L'USS salue l'initiative, mais considère que, face à l'ampleur du phénomène, il faut agir plus rapidement et efficacement. Elle soutient les projets d'intégration, à condition qu'ils ne fassent pas concurrence aux rapports de travail existants. Les dispositions minimales fixées dans les conventions collectives de travail (CCT) devraient en principe s'appliquer à tout le monde. Les exceptions doivent être discutées de cas en cas et dument justifiées. De plus, les projets d'intégration doivent avoir une composante de formation importante. Enfin, il faut tenir compte du fait que les réfugiés qui arrivent en Suisse ont souvent vécu des expériences traumatisantes et sont confrontés à diverses difficultés. Une vision holistique de la situation s'impose.

C'est pourquoi le Conseiller aux États Paul Rechsteiner (PS/SG), président de l'USS, a déposé une interpellation pour demander la tenue d'une Conférence nationale sur l'intégration des réfugiés dans la société et sur le marché du travail. Il souhaite la participation de tous les acteurs importants, en particulier des cantons, de l'économie et des partenaires sociaux, afin d'analyser ensemble la situation et de rechercher des solutions. Cette interpellation sera traitée par le Conseil des États le 2 juin.

Responsable à l'USS

Daniel Lampart

Premier secrétaire et économiste en chef

031 377 01 16

daniel.lampart(at)sgb.ch
Daniel Lampart
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