Des raisons sociales et écologiques pour rejeter l’initiative

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Écrit par Daniel Lampart

L’autogoal d’Ecopop



Lors de sa prochaine session, le Conseil des États examinera l’initiative Ecopop, dont le nom suggère davantage de durabilité. Or, elle génère l’effet contraire, c’est-à-dire une précarisation des conditions de travail et un impact accru sur l’environnement. Pourquoi ?

Le but de l’initiative Ecopop est de freiner l’augmentation de la « population stable » en limitant l’immigration, une mesure qui ne toucherait ni les frontaliers-ères, ni les titulaires d’une autorisation de courte durée. En effet, seuls sont assimilés à la population stable les étrangers et étrangères qui possèdent une autorisation de séjour ou d’établissement (permis B et C). Si les permis B et C étaient contingentés à la suite de l’acceptation d’Ecopop, les employeurs suisses se rabattraient sur les frontaliers-ères et sur les titulaires d’une autorisation de courte durée, créant ainsi un problème à la fois social et écologique.

L’autorisation de courte durée a pour corollaire un contrat de travail de durée déterminée, de sorte que son titulaire vivrait dans l’angoisse permanente de perdre non seulement son poste, mais aussi son droit de séjour en Suisse. C’est dire si la précarité augmenterait. Mis sous pression, certains titulaires d’autorisation de courte durée sont disposés à revoir leurs prétentions salariales à la baisse. Dans l’ancien système de contingentement, les saisonniers gagnaient par exemple près de 15 pour cent moins que les ressortissants suisses pour le même travail. En conséquence, la logique d’Ecopop favoriserait la sous-enchère salariale, en premier lieu pour les personnes directement concernées, mais aussi pour les salarié(e)s indigènes, lorsque, ultérieurement, les employeurs tenteront de leur imposer les salaires inférieurs versés aux titulaires d’une autorisation de courte durée.

Si les employeurs ont davantage recours aux frontaliers-ères, la pollution augmentera. Il est en effet possible de travailler comme frontalier en Suisse au départ de Londres ou de Varsovie : il suffit de rentrer à la maison une fois par semaine. Le frontalier ou la frontalière aura deux logements, l’un en Suisse, l’autre chez lui, et fera parfois de longs déplacements, dont certains en avion. Même si les zones frontalières étaient à nouveau limitées aux zones limitrophes de la Suisse, comme cela était le cas auparavant, le bilan écologique devrait être négatif. Il suffit de penser aux embouteillages le soir dans les régions frontalières.

L’initiative Ecopop repose à l’origine sur une erreur de raisonnement. Elle veut atteindre des objectifs en matière de durabilité en limitant l’immigration dans un territoire aussi petit que la Suisse. Cette approche est condamnée à l’échec. En effet, une personne qui émigre est déjà sur la Terre. Si elle occasionne dans son pays d’origine la même pollution qu’en Suisse, le bilan mondial reste inchangé, car la pollution n’a pas de frontière. Lorsque quelqu’un émigre d’Allemagne en Suisse, le bilan écologique mondial pourrait même s’améliorer, si cet immigré(e) prend moins la voiture et plus le train. Selon les statistiques officielles, l’automobile est davantage utilisée en Allemagne, tandis que la part des transports publics est supérieure en Suisse.

Il faut dès lors opposer une fin de non-recevoir à l’initiative Ecopop, qui repose sur une erreur de conception et nuit tant aux salarié(e)s qu’à l’environnement.

Responsable à l'USS

Daniel Lampart

Premier secrétaire et économiste en chef

031 377 01 16

daniel.lampart(at)sgb.ch
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