Stéthoscope placé sur des billets de franc suisse

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Primes et réduction des primes : état des lieux

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Écrit par Reto Wyss

Hausses de primes en 2023/2024

L’année dernière, l’augmentation de la prime moyenne d’assurance-maladie a atteint 6,6 % en moyenne suisse, et une forte hausse est également à prévoir pour l’année prochaine. Sur la base des chiffres et des informations actuellement disponibles, il faut s’attendre en 2024 à une augmentation des primes d’au moins (!) 7,5 %. Les calculs détaillés à l’origine de ce chiffre figurent en annexe.

En raison des hausses de primes de 2023 et 2024, une famille de quatre personnes (un enfant âgé de plus de 19 ans et un enfant de moins de 19 ans) doit s’attendre à recevoir l’année prochaine des factures de primes à hauteur de 15 200 francs en tout, soit pratiquement 2000 francs de plus que l’année dernière. Dans les cantons les plus chers, la même famille devra même consacrer plus de 19 000 francs à ses primes – et cela sans avoir sollicité le moindre soin de santé ni obtenu aucun médicament. En cas de besoin de traitement, il lui faudra encore payer les participations aux coûts (franchise, quote-part, taxe hospitalière) et les autres dépenses non remboursées (soins dentaires, nombreux médicaments, etc.).

État des lieux de la réduction des primes

La part des dépenses de santé financées par les pouvoirs publics est bien trop basse en Suisse. À côté des dépenses cantonales pour les hôpitaux, seules les réductions de primes font l’objet d’un financement solidaire, donc par l’impôt. Or leur poids dans les dépenses de l’assurance de base a quasiment diminué de moitié entre 2000, où elles dépassaient 12 %, à aujourd’hui où elles se rapprochent de 7 %. Corollaire de cette évolution, la charge moyenne des primes (après réduction) a plus que doublé entre-temps pour les ménages concernés, passant de 6,5 % à 14 %. Loin d’assumer leurs responsabilités, les cantons ont largement contribué à cette évolution, de trois manières :

  • Coupes : même si chaque année, de nombreux cantons consacrent des montants en francs un peu plus élevés à la réduction des primes (encore que 11 cantons aient réduit ces dix dernières années leur contribution en valeur nominale), ce paramètre n’est pas déterminant. Car outre l’économie (et donc les recettes fiscales), la population est en constante hausse, et les primes augmentent plus vite encore. Or les cantons n’en ont guère tenu compte – à la différence de la Confédération, donc la contribution est liée à l’évolution des coûts. Si l’on corrige les données en fonction de la croissance des primes et de la démographie, il s’avère que 17 cantons en tout ont revu à la baisse les moyens consacrés à la réduction des primes au cours des dix dernières années.
  • Sous-utilisation du budget : 17 cantons n’ont même pas épuisé le budget – souvent très modeste – prévu pour la réduction des primes en 2021, et 21 cantons étaient dans ce cas en 2022. Dans 19 cantons, le budget 2023 est en outre à la traîne des hausses de primes, avec pour effet à chaque fois une nouvelle baisse en valeur réelle des réductions de primes. Si par exemple le canton de Zurich avait épuisé l’année dernière son budget destiné aux réductions de primes (utilisé à 79 % seulement) et dûment réparti les moyens correspondants entre les bénéficiaires de la réduction des primes, l’effet d’allégement pour une famille de quatre personnes avec un revenu brut de 80 000 francs aurait été au total 820 francs plus élevé. Et si en 2022 tous les cantons avaient épuisé les montants budgétisés pour la réduction des primes, les assuré-e-s de condition économique modeste auraient obtenu 234 millions de francs en plus (+9 %).
  • Effet d’éviction : bien qu’une telle pratique soit juridiquement discutable, les cantons allouent depuis des années une partie des moyens financiers destinés à la réduction des primes (contribution fédérale comprise) aux remboursements de primes effectués par l’aide sociale et les prestations complémentaires (PC). Et cela alors même que dans la loi, il s’agit sans ambiguïté d’une responsabilité bien distincte. Cette pratique controversée fait qu’alors qu’un peu plus des deux tiers (68 %) des moyens financiers destinés à la réduction des primes étaient encore consacrés en 2000 à la réduction individuelle des primes des ménages à revenus modestes, ce n’est plus le cas en 2021, démographie oblige (hausse du nombre de bénéficiaires de PC), que d’un peu moins de la moitié de cette somme (46 %).

Développements politiques

L’initiative d’allégement des primes déposée par les syndicats et le PS au début de l’année 2020 déjà se trouve en phase finale des travaux parlementaires : à sa session d’automne, le Parlement devra se prononcer définitivement sur l’initiative et un éventuel contre-projet. Selon les dernières décisions adoptées par la commission compétente du Conseil national, le contre-projet généreusement doté (+2,2 milliards destinés à la réduction des primes) soutenu jusque-là n’est plus d’actualité. Il ne reste qu’un contre-projet largement insuffisant (version du Conseil des États), portant sur tout juste 360 millions de francs. S’il devait s’imposer au vote final, l’initiative populaire sera certainement mise en votation. En mars ou juin 2024.

Responsable à l'USS

Reto Wyss

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