Des prévisions économiques frivoles aux dépens des personnes assurées

  • Prévoyance professionnelle
Communiqués de presse
Écrit par Pietro Cavadini, responsable des campagnes de l’USS

Economiesuisse, qui organise pour les milieux économiques la campagne en faveur de la baisse du taux de conversion LPP, a fait connaître aujourd’hui son objectif concernant le scrutin du 7 mars prochain : « Les rentes actuelles sont trop élevées par rapport à l’allongement de l’espérance de vie et au rendement du capital dans les caisses de pensions. » Les organisations économiques vont donc s’engager pleinement en faveur de la baisse du taux de conversion LPP.

Economiesuisse se trompe toutefois à plusieurs égards, en effet :

  1. Le montant des rentes ne peut pas être uniquement fixé en fonction du « rendement du capital » ou de « l’allongement de l’espérance de vie », comme elle le prétend. Le critère est ici bien plutôt celui des besoins des rentières et rentiers, comme le dit la constitution fédérale : « la prévoyance professionnelle conjuguée avec l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité permet à l’assuré de maintenir de manière appropriée son niveau de vie antérieur. » Ce qui s’applique aussi en cas d’allongement de l’espérance de vie et de baisse du rendement du capital.
  2. Les rentes actuelles ne sont – quoiqu’en dise economiesuisse – nullement trop élevées. Les spécialistes de la branche des assurances le savent mieux que quiconque : « Les prestations des 1er et 2e piliers ne couvrent en règle générale que 60 pour cent du dernier revenu. Après l’entrée en retraite cependant, on table sur un besoin s’élevant entre 80 et 90 pour cent. Ce n’est qu’à ce niveau qu’il est possible de maintenir sans souci le niveau de vie antérieur » (trad. USS). Ces propos sont de M. Thomas Bah, le responsable du secteur opérationnel Particulier chez Swiss Life. Dans un prospectus de Axa/Winterthur, on peut aussi lire que les rentes de la prévoyance publique et professionnelle ne couvrent habituellement qu’environ 40 à 60 pour cent de l’ancien revenu et… qu’il faut combler cette lacune en contractant une prévoyance privée.
  3. En prétendant que le capital des caisses de pensions ne permet plus de réaliser un rendement suffisant pour maintenir l’actuel niveau des rentes, economiesuisse contredit ses propres spécialistes de la branche financière. Tant les grands banquiers que les dirigeants de la branche des assurances promettent à nouveau à leurs actionnaires un rendement de 15 à 25 pour cent sur les capitaux propres. Toutefois, le fait est que ni la phase de boom boursier de ces dernières décennies, ni l’actuelle crise financière n’ont été prévues par ces personnes qui prétendent aujourd’hui avoir su avec précision à l’époque comment évoluerait, ces prochaines années, le rendement du capital des caisses de pensions. Il ne s’agit là de rien d’autre que de prévisions économiques frivoles, aux dépens des personnes assurées.
  4. La prévoyance professionnelle existe depuis le 19e siècle déjà. Depuis lors, l’espérance moyenne de vie s’est continuellement allongée en Suisse. Les rentes servies par les caisses de pensions ont néanmoins augmenté, comme le bien-être général. L’argument de l’allongement de l’espérance de vie vient surtout des compagnies d’assurances et des conseillers en placements. Il sert uniquement à justifier de nouvelles baisses des prestations dans l’AVS et le 2e pilier. Le but est ici le suivant : toujours plus de personnes doivent être convaincues de contracter des assurances privées. M. Carsten Maschmeyer, membre du conseil d’administration de Swiss Life le dit sans fioritures : « Nous nous trouvons face au plus grand boom que notre branche ait jamais vécu : le transfert de la prévoyance vieillesse publique vers le privé est un marché en croissance pour des décennies… On ne peut certes pas avoir une vue d’ensemble précise quant à la façon dont se présente la montée de la prévoyance vieillesse privée. Mais c’est comme si nous étions assis sur une source de pétrole. Elle a été forée, elle est énorme et elle va jaillir » (trad. USS).

En résumé, la baisse prévue du taux de conversion LPP est inutile, fausse et en contradiction avec le mandat constitutionnel du 2e pilier. Elle servira uniquement à procéder à un nouveau « forage pétrolier » juteux en faveur de la branche des assurances.

Responsable à l'USS

Gabriela Medici

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