Travailleur plus âgé travaillant avec une machine dans l'usine

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Pas question d'exposer à nouveau les travailleuses et travailleurs vulnérables !

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Écrit par Luca Cirigliano

Assouplissement des mesures de protection : le Conseil fédéral doit faire marche arrière

À peine introduite, la protection du personnel vulnérable a été fortement réduite par le Conseil fédéral et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). Cette décision prise un peu en catimini met en danger la santé et la vie de milliers de personnes. Les conséquences en sont la peur et l’insécurité au travail.

Le message était clair et net : le 16 mars, le Conseil fédéral a complété l’ordonnance 2 sur les mesures de lutte contre le coronavirus (ordonnance 2 COVID-19) par une section sur la protection des personnes particulièrement vulnérables. Elles « doivent rester chez elles et éviter les regroupements de personnes » (art. 10b). Et elles travaillent « depuis leur domicile. Si cela n’est pas possible, l’employeur leur accorde un congé avec maintien du paiement de leur salaire » (article 10c).

La progression de la pandémie liée au coronavirus oblige le Conseil fédéral à adapter en permanence l’ordonnance à la situation actuelle. La dernière grande mise à jour a eu lieu le 20 mars avec l’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes, et des mesures pour amortir la perte de revenus.

Le communiqué de presse du Conseil fédéral taisait en revanche un autre changement, et non le moindre : l’article 10c al. 2 dispose dorénavant que les personnes vulnérables ne pouvant pas effectuer leur travail à domicile mais seulement au lieu de travail habituel doivent exercer leur activité si l’employeur garantit les « mesures organisationnelles et techniques à même de garantir le respect des recommandations de la Confédération en matière d’hygiène et d’éloignement social ». Ce n’est qu’en cas d’impossibilité qu’elles se verront accorder un congé avec maintien du paiement du salaire. Avec ce revirement après seulement quatre jours, le Conseil fédéral et l’OFSP mettent en danger la santé et la vie de milliers d’employé-e-s vulnérables dans toutes les branches.

Porte ouverte aux abus

L’alinéa en question ne précise pas quelles « mesures » doivent être prises et en quoi elles diffèrent des mesures habituelles. Pour rappel, il existe recommandation d’éviter les transports publics pour les personnes vulnérables, et l’OFSP les enjoint à ne pas quitter leur domicile, sauf pour des activités vitales comme la visite chez le médecin ou l’achat de nourriture. Et tout d’un coup, elles et ils sont censés retourner travailler au bureau, sur le chantier ou à la caisse de la Migros ?

Dans la pratique, le nouvel alinéa 2 ouvre la porte aux abus : les employeurs utiliseront des mesures alibi pour obliger les employé-e-s vulnérables à travailler sur place (construction, commerce de détail, bureaux) ou même à l’extérieur (soins à domiciles, nettoyage). Des litiges et une grande incertitude en résulteront. Mais surtout, il existe un risque que des employé-e-s vulnérables soient infectés par le coronavirus sur leur lieu de travail ou sur le chemin du travail, parce qu’ils ont été obligés de venir travailler au lieu de rester devant leur ordinateur à domicile ou d’être mis en congé pour raisons médicales.

La nouvelle disposition a été introduite à la demande des employeurs sans aucune consultation des professionnel-le-s de la santé au travail ou des syndicats. Elle doit être supprimée immédiatement. En fin de compte, elle met en péril la confiance fondamentale dans les mesures de la Confédération pour le monde du travail. L’USS appelle les conseillers fédéraux responsables, Alain Berset et Guy Parmelin, à agir immédiatement et à revenir à la formulation initiale. Pour les employé-e-s particulièrement exposés, les seules options sont le travail depuis le domicile ou la mise en congé. En outre, des décisions aussi graves dans le domaine de la protection de la santé ne peuvent plus être prises sans consultation préalable des syndicats.

Responsable à l'USS

Luca Cirigliano

Secrétaire central

031 377 01 17

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Luca Cirigliano
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