Dossier 104: Que faire pour instaurer l’égalité de salaire entre les sexes ?

  • Égalité des sexes
  • Salaires et CCT
Dossiers
Écrit par Christina Werder, David Gallusser und Daniel Lampart

Analyse des différences de salaire entre les femmes et les hommes
et contre-mesures politiques

Il n’y a égalité de salaire entre les sexes qu’en l’absence de différence entre les salaires des femmes et ceux des hommes. Mais pour en arriver là, la route est encore longue. Les femmes gagnent en effet toujours en moyenne près d’un quart de moins que les hommes. Elles travaillent trois fois plus souvent qu’eux pour un bas salaire, inférieur à 4 000 francs et occupent deux fois moins souvent une position de cadre. Mais, et surtout, elles touchent, à qualifications égales, 10 % de moins de salaire pour un travail de valeur égale à celui des hommes.

Que les différences de salaire entre les sexes n’aient diminué que dans une mesure infime pendant les 10 dernière années inquiète aussi. Car ce ne fut pas toujours le cas : dans les 20 années précédentes, les choses avaient progressé bien plus vite. La raison ? D’une part, une meilleure formation des femmes, qui ont rattrapé progressivement les hommes et, de l’autre, les importants progrès conquis par le mouvement des femmes et les syndicats. En témoigne l’introduction en 1996 de la loi sur l’égalité entre femmes et hommes. Pour la première fois, des femmes discriminées pouvaient réclamer devant les tribunaux le versement d’arriérés de salaire dus.

Pour que ces différences de salaire disparaissent totalement, il faut à nouveau redoubler d’efforts aujourd’hui. Le présent Dossier se pose la question des mesures à prendre. Dans un premier temps, il sera question des statistiques et de la littérature académique à ce sujet ; cela, afin d’analyser de manière approfondie les différences de salaire et leurs causes. Cette analyse repère deux causes principales aux différences et à la discrimination salariales :

  • La première est le travail familial, ménager et de soins non payé, accompli dans sa grande majorité par les femmes. Il permet aux employeurs d’exercer une pression plus forte sur les salaires des femmes que sur ceux des hommes. De fait, celles-ci doivent souvent accepter des salaires inférieurs pour pouvoir concilier travail rémunéré et travail non rémunéré. Parallèlement, ce dernier empêche les femmes de consacrer autant de temps à leur profession et à leur carrière que les hommes. Cela aussi induit pour elles des salaires inférieurs.
  • La deuxième cause, ce sont les normes et les structures sociales dominantes qui induisent un traitement discriminatoire des femmes sur le marché du travail et dans les entreprises. Elles se traduisent par une dévalorisation du travail féminin et du travail à temps partiel, qui est souvent le fait de femmes, ainsi que par les désavantages arbitraires subis par elles dans la négociation de leur salaire, à l’embauche et en matière d’avancement.

Les différences de salaire ne sont pas gravées dans le marbre. On le verra lorsque seront abordées ci-après les institutions du marché de l’emploi et les mesures politiques destinées à les réduire, dont font partie les conventions collectives de travail (CCT), les salaires minimums et des syndicats forts. Ces mesures entraîneront une réduction non seulement des inégalités salariales en général, mais aussi des inégalités entre femmes et hommes. Le congé parental payé et des structures d’accueil collectif de jour des enfants à un prix abordable diminuent également les différences de salaire en cela qu’ils permettent tant aux hommes qu’aux femmes de mieux mener de front travail familial et travail professionnel. Une meilleure répartition du travail non rémunéré, une des principales causes des différences de salaire, en est la conséquence. En revanche, les législations antidiscriminatoires contribuent le plus à l’égalité salariale si les entreprises sont contraintes d’agir de manière volontariste contre les rémunérations discriminatoires et si cette contrainte est vraiment effective.

Nous tirerons ensuite les enseignements utiles pour une politique de l’égalité des sexes en Suisse et formulerons cinq revendications en faveur de l’égalité salariale. Premièrement, il faut mieux protéger les salaires au moyen de CCT et d’un salaire minimum national. Les femmes, qui travaillent fréquemment pour des bas salaires, seront les premières à en profiter. Deuxièmement, il faut supprimer la discrimination salariale dans les entreprises de Suisse au moyen de contrôles, de transparence et de sanctions efficaces. Troisièmement, il faut encourager une répartition égale des activités rémunérées et non rémunérées entre femmes et hommes. Pour ce faire, il faut davantage de structures d’accueil de jour des enfants à un prix abordable et d’institutions pour les personnes dépendantes de soins, un congé parental payé et des horaires de travail plus courts et mieux maîtrisables. Quatrièmement, à l’aide de quotas et d’une politique de formation non sexiste, on veillera à ce que les femmes soient représentées comme il se doit dans tous les domaines du monde du travail. Cinquièmement, il s’agit de thématiser à nouveau de manière plus soutenue la question de la discrimination des femmes.

Responsable à l'USS

Julia Maisenbacher

Secrétaire centrale

031 377 01 12

julia.maisenbacher(at)sgb.ch
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